IV Eléments connexes (suite)
 

Orfèvres en la matière

A/ Des géoglyphes à leur modèle d'orfèvrerie :

Si donc la morphologie des géoglyphes géométrique n'est guère déformée il faut chercher à la lire et comprendre telle qu'elle est. Ce sont des éléments plats, sans épaisseur conséquente. En quelque sorte des feuillards ; ou des plaques effilées qui font penser à des lingots plats, les gavottes dont on tire des baguettes et fils de métaux précieux à travers les canaux de différentes sections de l'argue pour obtenir un diamètre fixe.

On sait que l'orfèvre précolombien utilisait en Colombie, sur le littoral et dans le haut plateau équatorien, dans les vallées andines d'Argentine, au Mexique ou au Pérou des fils métalliques. Un fil d'or de près de 34m et pesant 13kg a été découvert à Pueblo Rico de Apia, en Colombie. Une dimension qui interpelleCar avec une telle longueur il en avait suffisamment pour construire des motifs filiformes de bonnes dimensions sans l'intermédiaire de filigranes pour les agrandir en géoglyphes. Auquel cas la perspective agrandissante n'est pas pour autant remise en cause pour son principe. La mention de ce fil est donnée par P. Rivet, La métallurgie en Amérique précolombienne, 1946, p. 158..

Mais il ne semble pas que ces fils aient pu être obtenus à l'aide d'une filière faite d'un matériau plus dur que celui employé à leur fabrication, car ils ne présentent pas la même grosseur sur toute leur longueur, ainsi que Restrepo Tirado l'a noté sur certains exemplaires de Colombie. Paul Rivet l'a constaté sur un fil d'or du Mexique, fil de 3m de long dont deux fragments en son laboratoire avaient un diamètre qui variait sur l'un de 2.4mm à 1.9mm, et sur l'autre de 1.7 à 1.5mmP. Rivet, op. cité, ibid.. C'est bien le type de décroissance régulière qui affecte de nombreux fils aboutissant à la pointe des triangles figurés sur le sol de la pampa.. Le susdit anthropologue ajoute que les Précolombiens pouvaient obtenir des filigranes de 0.22mm. A Tumaco, en 1977, on a découvert trois fils d'une extrême finesse et datés de 325 av. J.-C.

Dans l'incertitude sur le mode de production précolombien de tels fils les archéologues ont proposé différentes techniques : martelage de baguettes métalliques quadrangulaires, coulage dans des canaux cylindriques creusés dans l'argile, et réel tréfilage chez les Mayas. Les géoglyphes de Nasca, montrant différents modes d'engendrement des fils à partir de leur départ ou arrivée aux triangles, devraient permettre d'améliorer la connaissance des procédés utilisés.

B/ L'or et l'orfèvrerie préincaïque :

L'or est le plus malléable et le plus ductile de tous les métaux, propriété qu'explique une structure dans laquelle les plans de glissement sont particulièrement nombreux. Les possibilités mécaniques de l'or justifient son emploi sous forme de feuilles très minces ou de filaments de faible section. On peut ainsi le réduire en feuilles de 1/10000 de mm d'épaisseur qui laissent percer une lumière verte. Un gramme d'or peut être étiré selon un fil de 3.5km. Doué d'une belle couleur jaune, l'or présente une forte densité : 19.5. L'existence du dit métal à l'état natif, sa malléabilité et la facilité avec laquelle il se travaille, outre son absence de corrosion atmosphérique, a comme corollaire que, pour développer son emploi, il faut le durcir avec des alliages de cuivre et d'argent dont les propriétés mécaniques (ténacité, dureté) sont supérieures à celles des métaux constituants.

Mujica Gallo, expert incontesté pour ce qui est de la connaissance et de l'étude de l'or péruvien, remarque, en ce qui concerne la qualité du métal qui y fut façonné par les préincaïques, "qu'au nord (Vicus, Halpalas, Tembladera, Frias, Chongorgape), l'or a plus de 20 carats. A Batan Grande et Chanchan, c'est de l'or de 17 à 20 carats. A Paracas, Nasca, Ica et Cahuachi, il n'atteint pas 16 carats. A Cuzco et Walla Walla le métal est de 12 à 16 carats"A. Miroquesada, L'or du Pérou, éd. Debroisse, 1981, texte de présentation des photos de F. Hidalgo. Selon Lothrop l'or avec martelage et repoussé apparaît au Nasca A. Le coulage au Nasca B..

Le carat est l'unité de poids pour l'or contenu dans les alliages selon une échelle qui va de 1 à 24 vingt-quatrièmes. Par exemple l'or des Nascas à 16 carats contient 16/24èmes d'or fin et 8/24èmes d'autres métaux (argent et cuivre). En général ces métaux étaient fondus dans le triple but d'améliorer la dureté, d'augmenter leur volume apparent, et d'abaisser leur point de fusion.

Les pourcentages des différents métaux qui composent les alliages varient aussi selon le but recherché. Pour la réalisation de pièces de grandes dimensions les proportions des métaux qui entraient dans le mélange s'équilibraient peu à peu, notamment lorsque ces métaux étaient travaillés par un laminage basé sur le martelage. Car en recuisant ou réchauffant les plaques à mesure qu'on les martelait, chaque recuit avait la particularité de faire remonter le cuivre à la surface de l'alliage, d'où on l'éliminait par différents procédés, ce qui avait donc l'avantage de reconcentrer en or ou / et argent la plaque travailléeA. Miroquesada, op. cité, ibid..

On rend un métal ou un alliage plus dur et plus élastique en le battant à froid, au marteau, ou en le faisant passer au laminoir, à la filière. On dit alors que le métal est écroui. Un métal ou un alliage écroui est plus dur et à un coefficient d'élasticité plus élevé. Par contre son allongement avant rupture est abaissé. Et si un métal augmente de volume en fondant, il augmente de densité par l'écrouissage. Exemple le cuivre.

Le recuit est un traitement thermique des métaux qui a pour but de rétablir leur texture cristalline normale et leur homogénéité, lorsque celles-ci ont été modifiées par des actions mécaniques ou thermiques précédentes, comme l'écrouissage ou le trempage. A titre d'exemple relevons qu'un élément de cuivre ou d'acier se comporte corrélativement ainsiEncyclopédie pratique et technique du bâtiment, Quillet éd., 1953, t. II, p. 286 et s.:

 
Allongement de rupture %
Limite d'élasticité kg/mm²
Acier dur 9 à 13 35 à 43
Acier moulé recuit 18 32
Cuivre rouge laminé 35 à 38 6
Fil de cuivre non recuit   12
Cuivre rouge fondu   3

Chiffres à méditer quand il sera question de l'alliage approprié pour les filigranes.

Le façonnage des objets en or se faisait à partir d'un lingot laminé à coups de marteau et recuit plusieurs fois, jusqu'à obtention de l'épaisseur souhaitée, certes variable mais oscillant en général entre 1 et 4 mm. Pour éviter les traces du marteau et de l'enclume on amortissait les coups en interposant des étoffes grossières qui, par leur élasticité naturelle, contraignaient le métal à s'aplatir en même temps qu'elles sous les coups. Le martelage conférait au métal dureté et friabilité. Cette dernière était éliminée à volonté par l'orfèvre à l'aide de multiples recuits qui rendaient à l'or sa souplesse naturelle, le martelage final lui donnant la dureté nécessaire. Le martelage fut l'une des toutes premières techniques utilisées et confirmées par les découvertes archéologiques dans le sud de la Cordillère centraleA. Miroquesada, op. cité. De son côté J. F. Bouchard (op. cité) estime que les fils d'or ont été obtenus à partir du découpage, par des ciseaux de pierre, d'un feuillard en une lainière ensuite travaillée au martelage. Et dans certains géoglyphes polygonaux on voit comme de telles lanières être découpées et émaner.. On y a par exemple trouvé des feuilles d'or avec enclume et marteau de pierre utilisés par un orfèvre qui travaillait il y a environ 3500 ans.

Au Pérou, au moins 100 ans avant notre ère, l'or est martelé à froid, avec des maillets de pierre ou transformé en feuilles minces, découpées par des burins de pierre, voire bosselées avec des fragments d'or sur des moules de bois et à partir de pépites en pur métal. Les plus anciens objets en or ont été trouvés à Changoyape, appartenant à ce qu'on dénomme "l'horizon culturel de Chavin", ou au nord, dans les grottes de Paracas, lors d'un stade évolutif influencé par le précédent à Disco Verde (700 à 500 av. J.-C.), donc antérieur à la période des nécropoles, et enfin à Nasca au sud. Dans un premier temps, le métal, réduit aux filons superficiels et aux dépôts alluviaux entraînés par les rivières, a du être trouvé plus ou moins dans lesdits lieux ou plus exactement dans leur zone d'influence respective, auxquelles s'ajoute une autre, peut-être plus étendue, dans la région des fleuves du sud-ouest. Mais le plus fréquent pourvoiement se faisait sans doute aussi par l'échange entre les produits alimentaires de la cité et la zone de pénétration vers la montagne, ou surtout vers les fleuves de la Selva NacienteIbid.. Malgré un massif andin épais et culminant souvent au delà des 6000m, il y eut quand même une intercommunication dans le sens transversal du territoire péruvien pour un tel troc.

L'acquisition des techniques de fonte, martelage, repoussé, rivetage, puis de tréfilage, soudure et cire perdue précéda, au Pérou et en Amérique du Sud, d'un millénaire et demi celle des orfèvres mixtèques au Mexique. Les premiers exemples de parures en or des préincaïques péruviens se situent peut-être au Vème ou VIème siècle avant notre ère. Il ne s'agit d'abord que de feuilles d'or découpées et martelées selon des motifs de félidés, très structurés par leur axe de symétrie. Dans l'orfèvrerie vicus coupes, bols, vases sont habillés au repoussé par une feuille d'or très fine. Les Mohicas portent l'orfèvrerie à son apogée, mais même au delà du sud péruvien, dans la mouvance de l'art vicus, les œuvres de la culture Frias ne sont pas inférieures.

Les ouvrages archéologiques sur la civilisation Nasca, eu égard à ses voisines, estiment qu'elle fait peu usage de l'or. Hormis pour les ornements de bouche, de nez, frontaux, et certains masques mortuaires, qui pourtant font tous l'attrait des albums, musées et collections publiques ou privées. Même l'on reconnaît qu'à certaines époques on cousait sur des chemises nasca des plaques d'or martelé qui répétaient parfois les motifs décoratifs de la céramique ; et l'on note aussi que lesdits masques avaient les bords découpés de façon à suivre les motifs au repoussé. Les poignets, les jambières, les spatules de Nasca font partie de l'éventail de production des orfèvres précolombiens.

Cependant l'utilisation parcimonieuse de l'or (qui n'élimine pas pour autant la haute considération rituelle et artistique du métal) se traduit peut-être aussi par la technique du filigrane, obtenue par un alliage ad hoc et qui devenait ainsi doublement efficace et économe puisqu'elle réduisait par deux moyens la quantité d'or mise en œuvre. Ce qui n'exclut pas qu'un usage un peu chiche de l'or ait pu avoir - mais sans preuve - comme avec la multiplication miraculeuse des pains, le souci d'un approvisionnement aurifère où la magie, la sacralisation précèdent de peu l'alchimie et autres manifestations irrationnelles.

C/ La soudure :

Des grains de collier, en forme d'œufs, en cuivre, en argent ou en or, trouvés à Nasca, dans les environs de Lima, et à Chanchan, sont formés de deux moitiés qui ont été soudées. Ce procédé de réunion de fragments de même métal entre eux était donc connu des Préincaïques.

Le géoglyphe de l'oiseau en vol (n° IV classification Reiche) dont le tracé débute par le bec fixé sans nœud à un fil rigide et dont la fin, à la queue du volatile, est de même, malgré une sinuosité plus longue, raccordée aussi abruptement à un autre fil rectiligne, illustre, grâce à l'agrandissement perspectif, la trace du procédé : sur le géoglyphe la fixation du fil du bec au plus rigide porteur présente le renfort ou le patin du cordon de soudure dans l'angle aigu, là où la triangulation sera efficace pour la stabilité la meilleure dudit montage.

Cet exemple n'est pas le seul. Le géoglyphe de la "frégate" (d'un charadriforme ou du "condor" selon d'autres interprétations), bien relevé par Maria Reiche, montre, à l'un des pouces d'une des deux pattes, le prolongement d'un long ongle, non engendré par circuit du fil d'ensemble, mais tangentiellement soudé à la première phalange du doigt.

Bergsof a suggéré une technique particulière pour la confection des pièces filigranées d'Antioquia en Colombie : dans de l'argile molle, les orfèvres creusaient un sorte d'auge ayant la forme de l'objet à fabriquer avec adjonction de fils métalliques, figurant tel ou tel détail de l'objet final, et incrustés dans ladite argile malléable. Quand le tout était sec, l'artisan plaçait l'empreinte dans une position parfaitement horizontale, versait l'or en fusion qui, sous l'action d'un chalumeau, unissait intimement aux fils métalliques l'ensemble de la pièce à réaliser. Or l'oiseau et triangle gigantesques de la pampa au sud du Rio Ingenio sont si imbriqués et fusionnés l'un à l'autre qu'une telle union semble possible si ce n'est certaine.

D/ Sur la morphologie du fil et de son pliage :

Différents indices plaident aussi pour l'utilisation de l'or comme matériau pour des petites maquettes, feuilles et filigranes ayant servi à projeter leur image agrandie en mégafresques sur la pampa.

D'abord la rectitude du fil les traçant au sol implique à l'origine une rigidité réelle : il ne peut donc être fait d'une matière dont la souplesse trop extrême ne lui permettait ni de se tenir droit, ni d'assumer seul, sans soutien, des bifurcations brusques très marquées, comme les "chicotes" de Nasca en présentent, malgré l'arrondi des retours anguleux : le cheminement suivi n'est pas dans l'esprit de celui qu'un fil de laine ou de coton tient.

L'idée que la conception des géoglyphes naturalistes s'est faite à partir de motifs en fils d'or vient du fait que la ligne tracée ne présente pas d'accidents ou d'événements graphiques avec angles aigus, vifs, nets, ce que rien n'aurait empêché de figurer au sol, tels qu'on en voit aussi sur les poteries ou tissus de Nasca, au travers d'un bec acéré ou de barbelures des plumes et rémiges des oiseaux dont les motifs décorent ces objets. D'autre part un fil de textile est par contre d'une telle souplesse qu'on peut, sans ou par le métier de tissage, notamment le nouer, plier et retourner sur ses pas, ou faire suivre quelque profil pointu, alors que le filigrane métallique reste tenu à des limites mécaniques de pliage notamment, et comme celles encore plus contraignantes qui affectent les tôles. Il faut donc bien tirer conclusion de ce que les géoglyphes linéaires, autrement plus souvent que les grand triangles, présentent des coudes et replis spécifiques et informatifs.

Le pliage est caractérisé par le rayon de courbure appelé "rayon de pliage", tributaire de la matière pliée. Elle subit une compression dans la partie intérieure concave de la pliure, et une tension dans la partie extérieure convexe. Ces contraintes de compression du côté intérieur et de tension du côté extérieur sont d'autant plus intenses que l'épaisseur de l'élément plié est plus grand. Plus le travail porte sur un motif filigranique, plus les possibilités de pliage s'améliorent dans les limites inhérentes au matériau. Les opérations de pliage, de cintrage et de cambrage s'effectuent aussi d'autant mieux que la limite élastique du métal travaillé est faible et que son allongement est grand. C'est donc aussi le cas du fil de cuivre selon sa pureté, ou en alliage avec l'or qu'il améliore en ce domaine. Et l'on sait qu'un allongement de fil étant toujours inversement proportionnel à sa section, le filigrane est particulièrement adapté à son travail et à sa production dimensionnelle.

Dans les exemples de géoglyphes où la courbure et le cintrage du fil sont les plus accentués (par exemple en bout de bec des oiseaux) ou dans ses repliements de rangement, le rayon du tracé peut descendre à la dimension de l'épaisseur dudit fil. Mais ce qui est caractéristique c'est que, quand sur telle ou telle mégafresque le fil l'engendrant change de section apparente, les angles de son repli varient en conséquence, dans le sens de la logique du matériau. C'est le cas de la fameuse "chicote" où, issu d'un triangle effilé, le fil, sortant de son apex avec une forte épaisseur, se retourne, puis replie en méandres anguleux et enfin en spirale, mais avec une progressive réduction de section parallèle à celle des angles entre plis, leur permettant ainsi de mieux se rapprocher, serrer, ranger, avant l'ultime stade de la pelote où la finesse et malléabilité du fil sont aptes à la constituer.

On peut multiplier les exemples. Lorsqu'un fil se replie par exemple trois fois en revenant à 270° de sa direction de départ, on constate qu'à chaque pliure la section se réduit en formant trois angles qui passent de l'obtus à l'aigu.

Les limites minima des rayons de courbures sont tributaires de la section, et de la nature du filigrane utilisé. La pureté ou les alliages du principal métal constitutif, l'or, modifiant ses potentialités comme développé précédemment, l'étude desdits rayons de pliage pourra, peut-être, un jour, en dire davantage sur la nature du matériau présent dans l'objet ayant produit par projection tel ou tel type de géoglyphes. A voir l'engouement des traceurs pour la reproduction parfois de pures spirales sur la pampa, ou la folle redondance et abondance de lignes et de replis, on peut même se demander si la prouesse, l'émerveillement à la technique, avec recherche de l'alliage aurifère idéal, ne furent pas, la ou l'une des causes de la prolifération des géoglyphes, avec des sujets, types et styles provenant de diverses options autant que de strates archéologiques successives.

E/ Questions sans réponses :

Sans avoir peut-être pris en considération toutes les données, compte tenu de celles qui ont pu échapper à notre attention, peut-on in fine tirer quelques conclusions provisoires sur tout ce qui vient d'être dit et rassemblé ?

Il apparaît par exemple un contraste à méditer entre les relativement libres circonvolutions du trait interne aux mégafresques naturalistes d'une part, et au contraire la rigidité, l'absence de fantaisie tant des lignes qui leur sont extérieures que de celles qui voisinent puis donnent accès aux géoglyphes géométriques d'autre part. Par exemple pour les fils qui rejoignent les grands triangles en leur apex. Ce que nous avons dit des qualités physiques et mécaniques des éléments métalliques en fils ou plaques (écrouissage, recuit, alliages, pliage…) devrait nécessairement avoir - et il y en a - des implications formelles ayant affecté les miniatures de trapèzes, triangles, rectangles, outre les lignes qui y arrivent ou en sont indépendantes. Bref il doit apparaître sur leurs projections une logique stylistique corrélative qui amène déduction. Les géoglyphes géométriques ou rectilignes qui, implicitement, apparaissent issus de modèles réduits très statiques, donc peut-être les plus fragiles, les moins aptes à être œuvrés par rapport aux plus malléables que paraissent les naturalistes, tirent-ils cette caractéristique du seul encombrement dimensionnel ou d'une répercussion comme l'écrouissage ?

Dans ce dernier cas il faudrait rejeter la pure pétition de principe qui, dans la plupart des descriptifs du complexe enchaînant triangle ou trapèze avec fil, se fait dans un seul sens de lecture, en partant d'abord du polygone comme source d'une ligne qui rétrécit jusqu'à s'engager dans le libre tracé d'une figure naturaliste. Car si l'écrouissage a déjà réduit les qualités mécaniques de la plaque en miniature, comment pourrait-il ensuite ne pas malmener un motif filigranique plus contraignant et fragile ? Sinon grâce à un recuit ? Faut-il imaginer, par une lecture en sens inverse, qu'un fil issu ou non d'un petit sujet réaliste croît en s'épaississant jusqu'à l'apex de la figure géométrique qui naîtrait dans la foulée, par un martelage de plus en plus intensif, permettant par cette alimentation laminée une plaque effilée et triangulaire, sans rupture ou échancrure du périmètre évasé qui en résulte. Pour les plaques rectangulaires ou trapézoïdales, l'arrivée souvent axialement sur une petite base, ne se fait pas comme par un delta ou entonnoir évoquant l'apex de la variante triangulaire. De plus l'accès de quelque autre fil sur un grand côté du quadrilatère complique encore la question. Et comment une plaque de métal du modèle projeté, quelque soit sa forme géométrique, aurait-elle pu, pour constitution, être alimentée par différents fils ? Ne faut-il pas en rester au sens de lecture initial, où la grande aire géométrique semble source des lanières puis fils qu'elle engendre, plutôt que d'envisager une articulation en sens inverse ? En d'autres termes nous devinons les causes de certaines caractéristiques sans être capables de les intégrer dans une construction synthétique du filigrane.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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