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1
Que n'ai-je de l'agrément
Pour avoir un amant tendre.
J'ai déjà plus de quinze ans
Et je suis lasse d'attendre.
Je vois que ma grande sœur
En a beaucoup à la suite.
Hélas j'ai bien du malheur
D'être encore au rang des petites.
2
L'autre jour dans un vallon
J'aperçois une bergère
Avec son berger mignon.
Je parlais d'amour sincère :
J'ai vu aussitôt leur sort
Ah mon pauvre cœur palpite !
Comment peindre ma douleur,
C'est un défaut d'être petite.
3
Viens à moi petit mouton
Que je te fasse caresse.
Quitte ton berger mignon.
- Il faut que tu sois ma maîtresse.
- Je n'ai pas tant de bonheur.
Ma sœur a tout le mérite.
Hélas que j'ai du malheur
D'être encore au rang des petites
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4
Derrière un buisson caché
Il sortit pour la bergère
Le plus joli des bergers,
Qui lui dit 'Paie ma poulette ! "
Ce loup parut étonnant,
Elle en fut toute interdite.
Rassurez-vous belle enfant :
Je suis votre amant ma petite.
5
Vous avez beaucoup d'appas,
Je trouve en vous une grâce
Que bien des grandes n'ont pas,
Car guère ne vous surpasse(nt).
Je veux joindre mes liens
Au nombre de vos mérites,
Puisque votre grande sœur
Vous en avez quoique petite.
6
Je rends des grâces à l'amour
Qui m'a donné l'art de plaire.
A mon berger chaque jour
Je veux lui être sincère.
Je suis content(e) aujourd'hui :
Mon malheur a pris la fuite
J'ai l'amant le plus joli
Quoique je suis encore petite.
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Sous l'aile de Madame de Sévigné
De la pastorale demeurent les personnages, bergère et berger,
outre le loup subsidiaire et métaphorique, mais l'esprit du texte ne relate
pas les relents de quelque lutte de classes sous la féodalité et l'Ancien
Régime. Il ne s'agit plus ici que de badiner sur la recherche amoureuse
entre jeunes gens de même appartenance rurale.
Une originale invite : "Paie ma poulette" ! L'impératif
verbal n'a pas de connotation monétaire et signifie seulement donner ce
qui est dû, naturellement, à un amoureux qui se déclare. La poulette,
mot figuré pour désigner une jeune fille ou une jeune femme, et comme
terme d'affection, est usuel au XVIIème siècle déjà, sous la plume de
Mme de Sévigné en 1681.

Les huitains de cette chanson, enchaînant leurs paires de
vers de 7 et 8 syllabes, se chantent aisément sur le vaudeville de "Ton
humeur est Catherine". Le dernier vers de chaque couplet a tendance
à s'individualiser comme un refrain.

(suivante)
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