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BOIRE POUR OUBLIER L'INFIDÈLE


1

J'aime la jeune Sophie,
Mais d'un amour sans égal.
L'infidèle m'a trahie(1)
En me donnant un rival.
Pour lui prouver ma constance
Je la voyais tous les jours
Je vivais dans l'ignorance
Que le sexe a de détours.

2

Je la croyais si sincère
Que je ne lui cache rien.
Le tendre nom de ma chère
Etait mon seul entretien.
Mais la cruelle Sophie
Vient de me jouer un tour.
Je n'oublierai de ma vie
Un aussi mauvais tour.

3

Le propre jour de sa fête
En lui portant un bouquet,
Je l'aperçus tête à tête
Avec un jeune cadet.
Il arrange sa frisure
Lui présentant son miroir.
Il retroussa sa coiffure
Jugez de mon désespoir.

4

Je lui dis "Belle Sophie
Je vous apporte une fleur.
Acceptez la je vous prie
Je vous l'offre de bon cœur".
D'un petit ton d'arrogance
Elle le prit de ma main
En faisant la révérence
avec un air de dédain.


(1) Participe avec un e final pour rime féminine, fautif pour l'orthographe, mais correct pour la métrique.

5

Je lui fais des durs reproches
Je ne pouvais plus tenir :
Cœur perfide, coin de roche
Tu veux me faire mourir
Tu m'as fait la promesse
De m'aimer jusqu'au trépas.
Je m'aperçois bien traîtresse
Que tu me fais un faux pas.

6

Rends moi, cruelle Sophie
Cette bague, ce clavier.
Elle, sans cérémonie,
Sans trop se faire prier,
Mes effets elle m'apporte.
Je les pris sans compliment.
Aussitôt je les emporte,
Un autre en eut fait autant.

7

Ah qu'un jeune homme est à plaindre !
Ah que le sexe est trompeur !
Que les filles sont à craindre,
Avec leurs airs enchanteurs
A présent je me méfie.
Il vaut mieux tard que jamais.
Je renonce pour la vie
A tous leurs charmants attraits.

8

Dorénavant je veux suivre
L'aimable dieu des raisins.
Dès aujourd'hui je m'enivre
Est-il un(2) plus heureux destin ?
Enrôlons nous camarade
Sous l'étendard de Bacchus
Allons boire des rasades,
Et renonçons à Vénus.


(2) Article inutile et excédentaire pour la métrique.

Et préférer Bacchus à Vénus

Thème classique où l'amant éconduit, voulant récupérer auprès de l'infidèle la bague offerte et le trousseau de clés domestiques, est mis à la porte avec ses effets, et va noyer son chagrin sous l'auspice du dieu du jus de raisin.

D'ailleurs chaque strophe, huitain enchaînant quatre paires de vers en 8 puis 7 syllabes, à rimes féminines puis masculines, peut être portée par le timbre ad hoc d'une chanson bachique de même tonneau, mais autrement méchante, Près de Paris la grande ville(1), qui vante, à la porte de la capitale, la guinguette de Jean Ramponneau où règne abondance de vins.

Air réel non identifié.

Cliquez pour écouter

(1)Source : "Les plaisirs de la société", livre I, 1761, chanson n°56 reprise dans Paris, Voix de Ville de R. Blanchard, Paris 1998, pub. Com. des tx his. de la Ville de Paris, p. 110.

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