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ADIEU LOUISON MON COEUR
(air non identifié)


1

Adieu chère Louison
Il faut partir tout de bon
Je vais voguer sur ces flots.
Dedans ton(1) vaisseau
Conserve moi tes amours.
Chère mignonne.
Belle quand je reviendrai
Je t'épouserai.

2

Va, tu me perces le cœur
De m'annoncer ce malheur.
Voudrais-tu m'abandonner,
Et me quitter ?
Tu dois pourtant cher amant
Connaître mon zèle.
Me laissant dans l'embarras
Je cours au trépas.

3

Rassure toi de ma foi,
Belle, je n'aime que toi.
Tu connaîtras ton amant
Toujours constant.
Non, jamais d'autres beautés
Ne saurons me plaire.
Je te promets mon cher cœur
De faire ton bonheur.

4

Je crains que le mauvais temps
Ne fasse du changement
Lorsque la mer est agitée,
Vient à gronder,
L'on est fort embarrassé
Dans la nuit obscure.
Tu regretteras le moment
De l'embarquement.


(1) Mon serait plus cohérent avec le récit.

5

Le grand dieu des matelots
Gardera notre vaisseau.
Lui seul peut nous préserver
De tous ces dangers.
Va, nous serons gouvernés
Par un bon pilote
Qui nous conduira au port,
Fera ses efforts.

6

Adieu mon fidèle amant.
Que ce départ est surprenant,
Me causera aujourd'hui Des pleurs !
Ah quelle douleur
Ressouviens-toi, cher amant,
De ta maîtresse
Que tu laisses sans secours
Jusqu'à ton retour

7

Il faut donc vous dire adieu
Embrassons-nous tous les deux.
Que le départ est fâcheux.
Dans ce triste lieu
L'équipage est préparé.
J'entends que l'on m'appelle.
Adieu Louison, mon cœur
Je pars tout à l'heure.

8

Dieu, soyez mon protecteur.
De Colin mon serviteur
Vous pouvez le préserver
De tous les dangers.
Il me quitte en effet
L'objet que j'aime.
Mais je languirai toujours
Jusqu'à ton retour.

Même peine, sinon même motif

Cette troisième chanson évoquant l'amant en partance sur un vaisseau, dont on ne sait s'il est militaire ou commercial, ni pour quelle destination, car seulement menacé par d'éventuelles intempéries, ne peut être, aussi clairement que le texte n° 34, classé dans la catégorie des chansons du soldat. Pourtant son début "Adieu chère Louison, il faut partir tout de bon" évoque l'incipit "Adieu ma belle Louison, il faut nous quitter ma chère" du "Départ pour la guerre"(1), mais non maritime, que Tiersot a relevé à La Tour (village de Chamonix) dans un manuscrit de 1823, et retrouvé aussi à Bessans (Haute-Maurienne) ou Névache dans le Briançonnais. Le dernier vers du huitain ou septain de toute strophe qui découpe l'une ou l'autre chanson comparée compte cinq syllabes, mais le corps central de la métrique respective de chaque couplet diffère d'un vers pour pouvoir être porté par le même timbre, malgré l'affinité. L'esprit du texte de la présente chanson est voisin de celle dont l'incipit Adieu je vais m'engager, mais vers un objectif américain défini, a été recueilli par Servettaz en Savoie(2). Dans tous les cas les prénoms populaires des amantes désolées sur le quai du départ circonscrivent un genre folklorique qui s'est maintenu dans la tradition orale et dont les variantes semblent bâties sur des modèles très voisins.

"Au large de l'ile de la Grenade, flotte anglaise et poissons volants", gouache de F.A.L. Dumoulin, musée du Vieux-Vevey.

(1) J. Tiersot, Chansons populaires recueillies dans les Alpes françaises, Paris-Grenoble, 1903, p. 406-407.
(2) C. Servettaz, Les chansons du soldat, CARE, Grenoble 1997, présentation D. Laborde et G. Delarue.

(suivante)