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Version Berssous
1
Je ne suis qu'une bergère
Je ne vois que mes moutons
Je ne veux ni aimer ni plaire
Je ne sais que des chansons
Pour tresser ma chevelure
Mon miroir est un ruisseau
Un bouquet fait ma parure (bis)
Tout mon bien est mon troupeau (bis)
2
Le matin Tircis m'appelle ;
Il s'approche à pas de loup :
Baisez moi ma toute belle
Me dit-il d'un ton bien doux !
Ton amant soumis et tendre
Ne soupire que pour toi.
Si tu veux lui laisser prendre (bis)
Un baiser et ton bouquet (bis).
3
Laissez, je vous prie de grâce,
Laissez cela se(1) dit-il.
Pour sa réponse il m'embrasse
Voici comment l'amant est subtil
J'ai beau faire ma retraite
Et bien vite me retenir
Non mon chien et ma houlette (bis)
Bouquet, baiser tout est pris (bis).
(1) Manque le prend comme dans la
version en parallèle..
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Variante du XVIIIème siècle
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Je ne suis qu'une bergère,
Je ne vois que mes moutons,
Je ne veux ni aimer ni plaire,
Je ne sais que des chansons.
Pour tresser ma chevelure
Mon miroir est un ruisseau ;
Un bouquet fait ma parure,
Et mon bien c'est mon troupeau.
-
Ce matin sa voix m'appelle ;
Il s'approche à pas de loup :
Laisse moi, ma toute belle,
Me dit-il d'un ton si doux !
Ton amant soumis et tendre
Se croira trop satisfait,
Si tu veux lui laisser prendre
Un baiser et ton bouquet.
-
Fi donc, laissez-moi de grâce,
Laissez, cela se prend-il ?
Pour sa réponse il m'embrasse :
Voyez qu'un homme est subtil !
Je veux fuir, il persévère.
Malgré mes efforts, mes cris ;
Malgré mon chien, ma colère,
Bouquet, baiser, tout fut pris.
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Il y a bouquet et bouquet
Subtile
broderie sur le thème du bouquet. D'abord parce qu'en littérature,
le Bouquet à Chloris, à Iris, à Philis, etc., est une courte pièce
de vers galants qu'on offrait à une femme aimée. Et le présent texte y
ressemble. Ensuite parce qu'il y a en conclusion l'illustration de la
locution garder quelque chose pour le bouquet, c'est à dire réserver
pour la fin ce qu'il y a de meilleur. C'est le bouquet signifie
d'ailleurs ce qu'il y a de mieux. Et puis il existe une confusion, qui
remonte sans doute au Moyen-Age, où les substantifs voisins, bochel,
embouchure, et boschel, bouquet, permirent un jeu de mot trouble
et polisson, à double sens, sur le bouquet, métaphore de l'organe sexuel
féminin, avec la perte du bouton ou du bouquet de rose.
Enfin, Tircis, ou Thyrsis, mythique compagnon de Dionysos,
tire son nom du thyrse, qui était symbole de vie et de fécondité
sous la forme d'une composition végétale en bouquet.
Toute cette redondance ne saurait être due au hasard.
Selon le Chansonnier françois(1), qui donne une version
mieux libellée et ponctuée que celle de Berssous, les airs n° 152 ou 54,
qui supportent le texte de cette chanson, et ceux de quelques autres,
sont dits provenant de la romance d'On ne s'avise jamais de tout(2),
ou de L'amant frivole et volage, la première sur musique de Monsigny
porteuse de paroles de Sedaine.

Mais une toute autre partition(3) de la chanson se trouve
sous le titre "Romance de la bergère" de "Sancho Pança"
(gouverneur dans l'île de Baratarin), un opéra bouffon représenté sur
le théâtre de la Comédie-Italienne et à Fontainebleau " devant sa majesté
". le 8 juillet 1762.

Davantage que le parolier Poinsinet, Philidor (François
André, dit Danican, 1726-1795) mérite attention particulière. Ce compositeur
de musique française, un des premiers créateurs de l'opéra-comique en
France (Blaise le savetier, Ernelinde, Le maréchal ferrant) eut
aussi la réputation d'être le premier joueur d'échecs en Europe. Il lui
arriva, jouant seul les yeux bandés, de pouvoir démasquer un tricheur
qui lui était opposé ; il a laissé une analyse du jeu d'échecs
qui fait encore autorité.
Cliquer ci dessous pour consulter la partition de
la Romance de Sancho Pança, par Philidor (cliquez sur page
précédente dans votre navigateur pour revenir au texte):
Cliquez ici pour écouter
les premières mesures de la mélodie du chant.
(1) édition de Paris, 1760-1762, réédition
par Slatkine, 1971 : Recueil XVI, p. 569, vol. II. Anormalement ce dernier
recueil se termine sans partitions associées aux textes des chansons.
Il faut aller les retrouver dans les recueils antérieurs : en l'occurrence
p. 522 du recueil XV. Erratum possible !
(2) Ibid., recueil XVI, p. 523 dans la réédition. Même remarque que note
précédente : le parolier serait Quétant !
(3) B.N. Vm5 126, Vm7 4975 (203), Fol Vm7 17081 (3).
(suivante)
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