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65
LA PROGRESSION AMOUREUSE
(air non identifié)


1

Quand je vois tous vos appas
Aminthe je m'engage (bis).
Quand je vois tous vos appas
L'amour me dit courage,
Jette toi dans ses bras.
Quand je vois tous vos appas (bis)(1).

2

Quand je suis auprès de vous
Tous mes troubles m'agitent (bis).
Quand je suis auprès de vous
Mon pauvre cœur palpite.
Que ce mystère est doux
Quand je suis auprès de vous.

3

Quand je tiens ce charmant bras
Qui porte tant d'envie (bis)
Quand je tiens ce charmant bras
Que mon âme est ravie.
Que de plaisirs hélas
Quand je tiens ce charmant bras.


(1) Bis douteux puisqu'il n'existe pas dans les autres strophes.

4

Quand je peux vous embrasser
C'est un bonheur extrême (bis),
Quand je peux vous embrasser
De dire que je vous aime.
Je ne puis me lasser
Quand je peux vous embrasser.

5

Quand je fais l'entrepreneur
Malgré votre défense (bis)
Quand je fais l'entrepreneur
Une douce espérance
Me rend la joie au cœur
Quand je fais l'entrepreneur.

6

Quand l'amour m'a couronné
Du titre de fidèle (bis),
Quand l'amour m'a couronné
Tout entier à la belle
Je suis abandonné.
Quand l'amour m'a couronné.

Le refrain, charpente du rondeau simple ou à rentrement

Conversation dans un parc, huile sur toile, T. Gainsborough, 1727-1788Ce qui a été dit, pièce n°49, du rôle du refrain, de sa nature et répartition dans les genres de chansons qui en comportent, s'applique donc pour la présente, un rondeau, fait pour la danse. Le texte la suggère d'ailleurs un peu puisque le galant voit la belle, est auprès d'elle et lui tient le bras. Sans plus, et dans peut-être seulement la limite du maintien et de la tenue gestuelle que cette danse permet et induit.

Au XVIIème siècle et au même XVIIIème, en France, le rondeau est la forme de base adoptée pour la danse de clavecin (gavotte, chaconne). Alors qu'il présentait primitivement le refrain au ton principal et les couplets à l'un des tons voisins, Couperin et Rameau s'efforcèrent de l'unifier, en enchaînant étroitement thèmes et couplets(1). Mais nous ignorons dans le présent cas la partition : le repérage chronologique dans cette évolution n'est donc pas possible.

Manuscrit, chanson 65, strophes 2-4A chaque moitié de strophe de notre chanson le dernier vers répète celui de l'incipit : si la paire de ces deux premiers vers forme un refrain, chacun l'est séparément puisque le second du couplet est seul bissé. Toute stance comporte donc au total 7 vers. On est là en présence du typique rondet de carole(2), ou rondeau simple, une pièce de 7 ou 8 vers sur deux rimes par strophe. Les vers-refrains (soulignés ci dessous) et les vers-couplets y sont agencés de la façon suivante :

2 vers + 1 +1 + 2 + 2 ou 1 = 8 ou 7 vers(3)

 

C'est la forme illustrée par Guillaume de Machaut ou Froissart. Elle recevra au XVIème siècle le nom de "triolet", s'expliquant par le couplet de huit vers, généralement octosyllabes, et dont trois, comme présentement, à savoir le premier, le quatrième et le septième, sont les mêmes, d'où le nom de la pièce. On trouve plus rarement des triolets de sept vers(4) comme dans cette chanson.

Par ailleurs le rondeau parfait comportait six strophes, mais avec des quatrains(5) plutôt que les six septains de notre exemple. Enfin le rondeau à rentrement marqua la substitution volontaire à l'intégralité du refrain de seulement la simple reprise des premiers mots du premier vers(6). C'est le présent cas dont le début de l'incipit, "quand je" (puis "quand" dans la dernière strophe) illustre cette répétition limitée.

Manuscrit, chanson 65, strophes 5 et 6 (à gauche)

Cette forme du rondeau se trouve déjà chez Villon et deviendra le rondeau classique du XVIème avec Marot, et du XVIIème avec Voiture. Le rondeau simple, sous l'appellation de "triolet", le rondeau double de Charles d'Orléans, et le rondeau à rentrement sont restés des formes relativement vivantes au XIXème siècle et qu'un Th. De Banville réutilisera(7).

(1) Gd. Larousse Encyclopédique, Paris 1964, t.9, p. 367-8
(2) Ancienne danse, au cours de laquelle les danseurs tournaient en rond en se tenant par le doigt, la main ou le poignet, lequel n'est guère éloigné du bras que tient le galant.
(3) Gd. Larousse Encyclopédique, op. cité, p. 367-368
(4) ibid., art. triolet, t. 10
(5) Gd. Larousse Encyclopédique, ibid., p. 368, t.9
(6) ibid.
(7) ibid.

(suivante)